L’homme soupçonné d’avoir tué huit personnes mardi au volant d’une camionnette sur une piste cyclable de New York a travaillé comme chauffeur et a vécu dans le New Jersey après avoir émigré d’Ouzbékistan il y a sept ans. Les enquêteurs ont commencé à l’interroger sur son lit d’hôpital.
L’attentat de New York a été perpétré mardi au nom du groupe Etat islamique (EI), a annoncé mercredi le chef adjoint de la police de New York, John Miller. L’assaillant blessé, un Ouzbek de 29 ans nommé Sayfullo Saipov, a été interrogé sur son lit d’hôpital. Il a subi une opération après avoir été blessé par un tir de sommation de la police, mais son état n’inspire pas d’inquiétude.
« D’après l’enquête conduite cette nuit, il apparaît que M. Saipov (…) l’a fait au nom de l’EI et parmi les objets découverts sur les lieux se trouvait un message » manuscrit en arabe, citant l’EI, a-t-il expliqué en conférence de presse. Saipov a reconnu être l’auteur de ces écrits.
« Il semble avoir suivi à la lettre les instructions que l’EI a publiées sur ses comptes de réseaux sociaux à destination de ses abonnés, indiquant comment mener une telle attaque », a souligné John Miller. Le message « était écrit en arabe ». « Il y avait des symboles et des mots. Mais le coeur du message était que l’Etat islamique serait éternel », a indiqué le policier.
« Plusieurs couteaux » ont également été « retrouvés à l’intérieur et autour du véhicule » utilisé pour foncer sur les piétons et les cyclistes dans le sud-ouest de Manhattan mardi après-midi. Les policiers ont également retrouvé « un pistolet de paintball et un pistolet à plomb », a précisé John Miller.
Le suspect «satisfait de ce qu’il a fait»
Saipov a déclaré aux enquêteurs être « satisfait de ce qu’il a fait », a indiqué mercredi soir le parquet fédéral, qui l’a inculpé pour terrorisme. Il a même demandé à pouvoir déployer le drapeau noir de l’EI dans sa chambre d’hôpital, selon les enquêteurs.
Inspiré par de nombreuses images de propagande de l’EI retrouvées dans ses deux téléphones portables, il préparait son attaque « depuis un an environ » et s’était décidé pour une attaque au camion-bélier il y a deux mois, indique la plainte du procureur.
Il a précisé avoir loué un camion le 22 octobre pour s’entraîner, et choisi le jour d’Halloween « pour être sûr qu’il y aurait beaucoup de gens dans les rues » ajoute la plainte. S’il n’avait pas heurté un bus scolaire, Saipov prévoyait de faucher des piétons jusqu’au pont de Brooklyn, qui relie Manhattan à Brooklyn, a encore précisé le parquet.
Transporté en chaise roulante au tribunal, les chefs d’accusation lui ont été signifiés mercredi soir. Il a ensuite été incarcéré dans une prison new-yorkaise, selon le bureau du procureur.
La chronologie fournie mercredi par la police montre que sa virée meurtrière, sur une promenade très fréquentée du sud-ouest de Manhattan, en pleine fête d’Halloween, a été ultra-rapide: il a loué la camionnette-bélier dans le New Jersey juste après 14h00, ralliant rapidement Manhattan avant de foncer autour de 15 heures sur la promenade qui longe l’Hudson River.
«Il est devenu religieux sur un coup de tête»
Arrivé en mars 2010 de l’Ouzbékistan, Sayfullo Saipov, né en février 1988, résidait légalement aux Etats-Unis et ne faisait pas l’objet d’une enquête. Il semble qu’il ait habité dans l’Ohio, en Floride et dans le New Jersey.
Un migrant ouzbek qui l’a rencontré en Floride il y a quelques années a déclaré au New York Times qu’il avait été camionneur en Floride avant de devenir chauffeur pour la plateforme Uber quand il a déménagé dans le New Jersey.
Selon le quotidien new-yorkais, Saipov vivait à Paterson, une ville industrielle du New Jersey située à une quarantaine de kilomètres du lieu de l’attaque. La police new-yorkaise a précisé mercredi que le suspect avait loué le véhicule dans un magasin de bricolage Home Depot à Passaic, une commune au sud de Paterson, une heure seulement avant son passage à l’acte. Sayfullo Saipov était également connu des services de police pour une série d’infractions au Code de la route, selon la presse et des documents judiciaires.
Un de ses compatriotes qui dit avoir discuté pour la dernière fois avec lui il y a deux mois a affirmé qu’il s’était intéressé à la religion après son arrivée aux Etats-Unis. « Il est devenu religieux sur un coup de tête », a ajouté Mirrakhmat Muminov, un chauffeur routier établi à Stow, dans l’Ohio, actif au sein de la communauté ouzbèke aux Etats-Unis. « Il s’est mis à étudier la religion aux Etats-Unis. » Saipov, a-t-il ajouté, a vécu deux à trois ans à Stow, où les deux hommes se sont rencontrés.
Il vivait auparavant à Tachkent, la capitale de l’Ouzbékistan, ancienne république soviétique d’Asie centrale où la pratique de l’islam est strictement contrôlée par les autorités qui redoutent l’émergence de mouvements musulmans radicaux.
Le portrait que Muminov dresse de lui est celui d’un homme ayant du mal à s’intégrer aux Etats-Unis, ayant peu d’amis et s’exprimant mal en anglais. « Il était en retrait, nerveux, parfois agressif. Parce qu’il était seul, il vivait dans son propre monde et n’était pas très populaire », dit-il.